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Nucléosynthèse: l’alchimie cosmique


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Au début de l’univers, il n’existait que de l’hydrogène et de l’hélium. Aujourd’hui, nous observons autour de nous une grande variété d’éléments chimiques, des éléments organiques comme le carbone, l’azote et l’oxygène, des métaux précieux comme l’or, l’argent ou le platine... Tous ces éléments sont constitués d’atomes différents et... tous ces atomes sont venus des étoiles! Toute la diversité du monde a été fabriquée au cœur des étoiles ou lors de leurs explosions. Les étoiles ont patiemment assemblé les particules, protons et neutrons, pour former les 92 éléments stables connus: c’est la nucléosynthèse.



Qu'est-ce-que c'est?


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La nucléosynthèse est l’ensemble des processus physiques conduisant à la formation des noyaux des atomes. Les scientifiques savent que les atomes n’ont pas toujours été présents: il y a 13,7 milliards d’années, l’univers ne contenait qu’un mélange de lumière et de particules élémentaires, notamment des protons et des neutrons, briques de base des noyaux atomiques. Sous l’effet de l’expansion de l’univers, ce mélange s’est refroidi autorisant la formation des premiers noyaux. Cette nucléosynthèse primordiale cesse en quelques minutes et ne produit que les noyaux les plus légers, deutérium, lithium et hélium notamment. Pour construire des noyaux plus lourds (c’est-à-dire ayant un plus grand nombre de protons et de neutrons) il faut attendre la formation des premières étoiles. Les réactions thermonucléaires qui se déroulent dans le cœur dense et chaud d’une étoile assemblent deux noyaux légers pour produire un noyau plus lourd. Cette nucléosynthèse stellaire produit une grande partie des noyaux moins lourds que le fer. L’explosion des étoiles les plus massives provoque une autre forme de nucléosynthèse – explosive – produisant la plupart des noyaux plus lourds que le fer. Enfin, des noyaux légers comme le béryllium et le bore sont produits par collisions de particules rapides – les rayons cosmiques – sur des atomes du milieu interstellaire. C’est l’ensemble de ces processus qui expliquent la diversité et la répartition des atomes que nous observons dans l’univers.

Pourquoi l’étudie-t-on?


L’étude de la nucléosynthèse est un formidable moyen de reconstruire l’histoire de l’Univers. La découverte de son expansion implique qu’il fut plus dense et plus chaud que nous l’observons aujourd’hui. La découverte du rayonnement diffus cosmologique a montré que la température de l’Univers avait été, dans un passé très reculé, supérieure à 3 000 Kelvins. La mesure des différents noyaux atomiques présents dans les très vieilles étoiles permet de remonter encore plus loin dans le passé, à une époque où la température de l’Univers dépassait 1 milliard de Kelvins. L’analyse détaillée de la proportion de certains noyaux permet alors d’estimer la fraction de matière ordinaire présente au début de l’univers.
Mais la nucléosynthèse est aussi la source d’énergie qui permet aux étoiles de briller durablement. Les réactions de fusion qui se déroulent en son sein assemblent des noyaux légers, comme l’hydrogène, pour former des noyaux plus lourds, comme l’hélium, en dégageant l’énergie qui compense celle que l’étoile rayonne par sa surface. Les étoiles les plus massives finissent leur vie en explosant violemment. En éjectant à grande vitesse les produits de leur nucléosynthèse, elles enrichissent le milieu interstellaire en noyaux lourds. Ils représentent désormais 2 % de la masse de matière lumineuse. Notre univers est encore très jeune du point de vue de son évolution nucléaire et sans la nucléosynthèse provoquée par les étoiles, il ne contiendrait que les quelques éléments primordiaux.

Voir en direct la fabrication des atomes


Certains des noyaux d’atomes formés au cœur des étoiles sont instables. Ils se désintègrent progressivement à un rythme mesuré par leur « demi-vie », la durée au bout de laquelle la moitié des noyaux a disparu. En se désintégrant, ces noyaux émettent des particules et une lumière de très haute énergie, un rayon gamma. Chaque noyau instable a ainsi sa propre « carte d’identité lumineuse » qui permet de le reconnaître.
Grâce à des satellites observant depuis l’espace, il est maintenant devenu possible de détecter ces rayons gamma et les chercheurs du laboratoire Astrophysique, Interactions, Multi-échelles (AIM) voient ainsi, presque en direct, la fabrique des noyaux.
Seuls quelques-uns ont pu être observés jusqu’ici, parmi lesquels l’un des plus abondants est l’Aluminium-26. Ce noyau instable a une demi-vie de 720 000 ans. Il est produit tout à la fois par les étoiles géantes rouges au cours de leur vie et lors des explosions d’étoiles très massives. La carte de son abondance dans notre Galaxie, obtenue par les satellites GRO et INTEGRAL, montre qu’il est concentré dans le plan de notre galaxie et qu’il a été produit par l’explosion d’environ 20 000 étoiles pendant le dernier million d’années.
Pour l’instant, seuls trois autres noyaux (Fer, Cobalt et Titane) ont pu être observés pour permettre de retracer cette nucléosynthèse en direct.

D’où vient l’or?


L'or est à la fois dense et tendre et universellement apprécié pour la qualité de son éclat. Mais d'où vient-il?
Avec ses 79 protons, le noyau de l'atome d'or (79Au) est beaucoup plus massif que l'argent (47Ag) ou le fer (26Fe). On a longtemps cru que les supernovæ offraient les bonnes conditions pour former tous les éléments plus lourds que le fer au moment de l'explosion, lorsque des noyaux lourds sont exposés à un flux intense de neutrons: c'est la nucléosynthèse explosive.
Des modèles développés ces dix dernières années suggèrent que les éléments les plus lourds, comme l'or ou le plomb (82Pb), ont une formation plus subtile qui résulte de l'évolution catastrophique d'un système de deux étoiles à neutrons. Chacune de ces étoiles est le fruit de l'effondrement du cœur de fer d'une étoile massive juste avant l'explosion de son enveloppe en supernova. Quand deux étoiles à neutrons forment un système binaire, elles se rapprochent graduellement l'une de l'autre. La coalescence (réunion des deux corps) qui en résulte provoque une nucléosynthèse explosive très efficace pour former tous les noyaux plus lourds que le fer. Elle se traduit aussi par la formation d'un trou noir et l'émission d'une intense bouffée de rayonnement gamma appelée « sursaut gamma », si puissante qu'on peut l'observer jusqu'aux confins de l’Univers.
Ces flashes de rayons gamma observés par centaines chaque année nous rappellent que l'or se fabrique aussi dans les galaxies les plus lointaines.

 

  • Explosion d'une étoile
  • Noyau instable
  • L'origine des éléments chimiques
  • Restes de Sanduleak

Liens utiles


Explosion radioactive dans Cassiopée: le satellite INTEGRAL mesure le titane radioactif d'une d'étoile morte: http://irfu.cea.fr/Sap/Phocea/Vie_des_labos/Ast/ast_visu.php?id_ast=968

Supernova dans un verre d'eau: première analogie hydraulique de l’explosion asymétrique d’une étoile: http://irfu.cea.fr/Sap/Phocea/Vie_des_labos/Ast/ast.php?t=actu&id_ast=3155

Le laboratoire Astrophysique, Interactions, Multi-échelles (AIM) a contribué de façon majeure à la construction des deux instruments ISGRI et SPI pour le satellite INTEGRAL: http://irfu.cea.fr/Sap/Phocea/Vie_des_labos/Ast/ast_technique.php?id_ast=1026

Le site web du laboratoire Astrophysique, Interactions, Multi-échelles (AIM): http://irfu.cea.fr/Phocea/Vie_des_labos/Ast/ast_service.php?id_unit=3

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